Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe des Rameaux à Saint-Germain l’Auxerrois

Dimanche 24 mars 2024 - Saint-Germain l’Auxerrois (1er)

– Dimanche des Rameaux et de la Passion – Année B

- Is 50,4-7 ; Ps 21, 8-9.17-20.22-24 ; Ph 2,6-11 ; Mc 14 1 à 15,47

Pour entrer dans la Semaine sainte, pour entrer dans la compréhension, dans la méditation de cet évangile de la Passion selon saint Marc, je vous invite ce soir à rester attentifs aux petits épisodes de l’ouverture de ce récit, que nous avons entendus au début.

Il y a d’abord le complot contre Jésus, mené par les grands prêtres et les scribes, qui se vit dans un calcul de nature politique. Il faut faire disparaître Jésus mais pas pendant la grande fête de Pâques, il faut éviter de faire des vagues. Mais il y a surtout le deuxième épisode, qui est très frappant pour nous, celui dans lequel nous voyons cette femme entrer dans la maison de Simon le lépreux et verser sur la tête de Jésus un parfum de grande valeur, de grand prix. A Béthanie il n’y avait donc pas seulement Marie, Marthe et Lazare, mais aussi Simon, ce Simon dont on parle à l’instant. Sa réputation de lépreux l’entoure, et probablement Jésus a dû le guérir - quoiqu’il n’en soit pas fait mention dans ce récit – mais la réputation reste autour de lui, il est peut-être encore quelqu’un de difficilement fréquentable. Mais Jésus n’a pas peur et il le fréquente, il reste avec lui, il entre dans sa maison. Jésus est libre et la femme l’est autant : elle entre dans cette maison sans peur, elle n’a pas peur de la réputation du lépreux, elle est libre aussi. Et elle fait à Jésus un don étonnant, le don de ce parfum de grande valeur.

Elle me fait penser, et peut-être à vous aussi, à un autre passage du même évangile de saint Marc, quelques lignes avant le récit de la Passion, ce passage dans lequel nous voyons Jésus dire son émerveillement devant le don de deux piécettes par une pauvre veuve dans le trésor du temple. Jésus dit d’elle : « Elle a mis tout ce qu’elle possédait » (Mc 12,44). Et de la femme qui verse le parfum sur la tête de Jésus dit : « Laissez-la ! Il est beau, le geste qu’elle a fait envers moi » (Mc 14,6). Ce sont deux générosités qui s’expriment et qui entourent Jésus : deux grandes générosités, des dons, des dons de grand prix, même quand ce ne sont que deux piécettes. C’est le don de la vie, c’est le don de la bonté, c’est le don de la générosité totale. Et de cette femme dont il est question ici, Jésus annonce que : « Partout où l’Évangile sera proclamé – dans le monde entier –, on racontera, en souvenir d’elle, ce qu’elle vient de faire. » (Mc 14,9). Et de la pauvre veuve qui avait mis deux piécettes dans le trésor du temple, on parle également depuis vingt siècles et sur toute la Terre. Jésus a raison de dire que ces deux générosités-là on en parle : elles sont pour toujours associées au don de Jésus. Ces deux dons-là sont donc aussi importants, d’une certaine façon, que le don de Jésus.

Jésus est libre d’aller chez Simon le lépreux, Jésus est libre quand il va jusqu’à la mort, Jésus a le désir profond de tout donner de lui, même s’il préférerait de vivre. Mais il veut tout donner et il veut s’associer deux personnes demeurées anonymes, deux personnes au geste généreux, deux personnes au geste minuscule au regard de l’histoire humaine. Mais pour toujours, ces deux personnes, dans leur grande générosité, sont associées au don du Christ.

Aussi bien sommes-nous invités aujourd’hui, avec elles, à donner ce que nous avons et ce que nous sommes généreusement, à nous laisser associer au don total de Jésus. La semaine qui vient est faite pour nous y préparer.

+Laurent Ulrich, archevêque de Paris

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