Homélie du Cardinal André Vingt-Trois - Messe à la Maison Marie-Thérèse

Dimanche 30 avril 2023 - Maison Marie-Thérèse (14e)

– 4e Dimanche du Temps Pascal – Année A

- Ac 2, 14a.36-41 - Ps 22 (23), 1-2ab, 2c-3, 4, 5, 6 - 1 P 2, 20b-25 - Jn 10, 1-10

Frères et Sœurs,

Nous connaissons bien cette parole du Christ, qui se désigne comme le bon pasteur. Mais il nous faut peut-être approfondir un peu. Il n’est pas le bon pasteur parce qu’il serait meilleur pasteur que les autres. Il est le bon pasteur parce qu’il est le seul pasteur, « le vrai pasteur » serait plus juste que « le bon pasteur ». Les autres sont des voleurs et des bandits ; lui, il est venu pour que les brebis aient la vie, pour que les hommes aient la vie. Dieu l’a envoyé en ce monde pour appeler l’humanité à la vie divine, et seul, il peut les appeler. Seule sa voix peut les conduire, seule sa parole est garantie. Elle est garantie par Dieu à travers les signes qu’il lui donne d’opérer. Elle sera garantie par Dieu à travers le don qu’il fait de sa vie sur la croix, à travers la résurrection et la pentecôte.

C’est dire que ce ministère pastoral est au cœur de toute la vie ecclésiale, car il est la garantie que nous marchons selon la voix de Dieu. Une parole garantie, cela n’est pas si fréquent et cela n’est pas si facile. Tout le monde peut prendre un bout de pain et dire les paroles de la consécration. Tout le monde peut prendre un verre de vin et dire les paroles de la consécration. Mais si vous vous approchez pour communier vous ne direz pas « Amen » sans être sûr que ces paroles ont été dites par le Christ, au nom du Christ et pour le Christ.

Et donc, ce ministère qui fait de nous les instruments de la présence active de la parole du Christ pour la vie de son peuple est absolument central et incontournable. On peut distribuer les fonctions, on peut distribuer les tâches, on peut former des théologiens, des exégètes, on peut trouver des missionnaires, mais ce qu’il nous faut d’abord, c’est d’avoir une parole garantie, sûre, sacramentelle. C’est ce sacrement qui garantit notre parole. Ce ne sont pas nos qualités, nos compétences, nos talents, nos vertus, nos efforts ! C’est que nous avons été choisis, appelés, et consacrés pour être les acteurs de cette parole du Christ. Ceci nous dépasse évidemment infiniment, mais il faut que le peuple fidèle, rassemblé dans la prière, sache que celui qui préside la prière et qui va agir au nom du Christ est garanti, qu’il n’est pas un voleur ou un bandit, qu’il n’est pas un pervers qui vient détourner la parole de Dieu de sa fin, qu’il n’est pas venu ici pour exploiter les chrétiens mais qu’il est venu pour livrer sa vie avec le Christ. Pour qu’ils aient tous leur vie en Dieu.

Cette vocation magnifique, nous savons, nous qui la vivons, ce qu’elle peut coûter. Nous savons surtout combien elle peut combler de joie le cœur d’un homme qui découvre, dans sa misère et dans sa faiblesse, que le Christ, aujourd’hui, agit pour son peuple.

Oui, heureux le serviteur que son maître, en revenant, appelle à prendre place à sa table. Heureux celui en qui il reconnaît sa parole. Heureux celui dont il garantit la tâche par le don de son Esprit.

Prions, non seulement pour les pasteurs répartis à travers le monde, mais prions surtout, et encore, pour ceux qui sont appelés à cette mission pastorale. Qu’ils n’évaluent pas l’appel qui leur est adressé à la mesure des fonctions sociales. Ils ne sont pas appelés à devenir des chefs, ils ne sont pas appelés à devenir des leaders, ils sont appelés à devenir serviteurs dans le Christ, comme le Christ, pour donner leur vie pour la vie du monde.

Amen.

+André cardinal Vingt-Trois, archevêque émérite de Paris

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